L'été 2012 s'annonce, motivation au beau fixe. Deux belles batteries neuves, les anciennes n'ont pas supporté l'hiver. Notre voisin garagiste nous offre de beaux sièges qui sont rapidement montés. Alors que nous testons le nouveau confort du camion, l'embrayage lache devant la maison. A la dépose, nous constatons que le cardan de transmission boite de vitesse vers boite de transfert est mort, pas loin de la rupture. Quand a l'embrayage, disque fendu, et un ressort sorti de son logement.

Le tout est réparé sans difficulté. Essai routier, rien à signaler, si ce n'est une souplesse de conduite retrouvée. Le jour du départ, moins de cinquante kilomètres parcourues, moteur en surchauffe. Là, mauvais signe. Tout le circuit de refroidissement venait d'être nettoyé (traitement à base d'acide phosphorique), et le radiateur ressoudé (il avait craqué l'an dernier). Nous soupçonnons la pompe à eau. A sa dépose, nous constatons qu'elle est neuve. Le thermostat ? Il a été supprimé depuis longtemps. Joint de culasse : à la dépose, rien d'anormal. Vu que la culasse est déposée, nous procédons à une rectification et remplacement de tous les joints, y compris ceux des injecteurs. Repose et essai : c'est mieux, mais ça chauffe toujours. Malheureusement, coup classique sur ces vieux moteurs Man, nous avons affaire à un phénomène de cavitation : des micro-fissures sur les chemises. Pour ceux qui veulent en savoir plus, une petite définition :

La cavitation se produit surtout au basculement du piston (du côté compression ou dépression) et est provoquée par les vibrations de la paroi du cylindre. Ces vibrations à hautes fréquences résultent de la pression à la combustion, des forces latérales agissant sur le piston et du changement de sens de basculement au point mort haut et au point mort bas. Si le liquide de refroidissement ne peut plus suivre les vibrations de la paroi du cylindre, ceci provoque un détachement momentané du film du liquide sur la chemise. Dans la zone de dépression ainsi obtenue, se forment des bulles de vapeur qui sous l’effet des contre vibrations de la paroi du cylindre, implosent à très grande vitesse. Le liquide de refroidissement, repoussé par les bulles, retombe violemment sur la paroi du cylindre après leur implosion. L’énergie superficielle engendrée arrache des particules infimes de la surface du cylindre. Avec le temps, ce phénomène perce de véritables trous. Il est à remarquer que lorsqu’il y a cavitation, les trous s’élargissent de plus en plus vers l’intérieur et forment ainsi de véritables grottes ou « caves » dans la matière... D’où leur dénomination : cavitation.

Pour visualiser le problème, il est possible d'utiliser un jeu d'aérosol avec un révélateur.

Nous chiffrons les réparations : même en faisant tout nous même, avec le prix des pièces, et sous réserve de tout trouver... c'est très cher. Partir sur un moteur d'occasion ? Trop risqué, sachant que le problème semble réccurent sur les moteurs Man des Saviem SG2/TP3.... Le camion est remisé jusqu'à ce que nous recevons un email de notre ami tchèque : "Viens, je t'ai mis un moteur de côté !"Et oui ! Avia a produit ces moteurs en République Tchèque. Ils sont bien plus récents que les français, et parfois plus élaborés. Vaclav nous offre un Avia D421 : On reconnait le bloc Man, mais il est plus moderne : Turbo, dispositif de préchauffage à bougies... une puissance autour de 115cv.

Nous faisons l'aller et retour entre les fêtes de fin d'année pour ramener le bloc et les pièces nécassaires au montage. Au passage, quelques repérages sur son camping car qui est équipé du même moteur. Le montage sur le TP3 sera quasi identique.

[Edit 2014] J'ai laissé les photos et commentaires, ils témoignent du cheminement, des erreurs aussi, de cette adaptation pas si simple.

 

Arrivée du bloc au garage.

Montage dans l'Avia tchèque

BV face au bloc Avia

La grue nous sert à déposer la boite de vitesse.

C'est parti ! Il fait froid, -3°C. Quelques flocons, bref le temps idéal pour faire de la mécanique. Pour aider aux travaux Jean, Magalie & Franck seront de la partie. Nous allons tenter de faire la dépose/repose par l'habitacle. L'autre méthode consiste à passer sous le camion, donc levage et dépose du train avant. Dans les deux cas, ce n'est pas simple.

Nous faisons de la place : dépose du radiateur et de sa traverse, dépose de la boite de de vitesse : On pourra ainsi manoeuvrer plus facilement.

Une petite astuce, pour faciliter la dépose de la boite de vitesse, avec un cric, incliner un peu le moteur vers le haut (2/3 cm), ça sort tout seul.

Un premier test éloigne nos doutes : Nous présentons la boite devant le bloc Avia. Elle semble s'adapter directement sur le bloc Avia. Le volant moteur est différent, la surface de friction est plus importante sur l'Avia.

 

A grands maux, les grands remèdes : pour déposer le bloc, Franck utilise sa pelle-mécaniqe. Bien pratique, mais pour gagner en battement, il faut créer un dévers en mettant le camion sur câles.

Finalement, pas si difficile que ça. Il faut déposer l'alternateur, la pipe d'admission pour faciliter la manoeuvre. Une fois levé, déposer également les supports moteur pour gagner encore un peu de place.

Sortie du bloc Man.

Avant de poser le bloc Avia, nous procédons aux modifications : dépose du compresseur et de la pompe hydraulique. La platine de l'ensemble est tenue par 6 points de fixation. La pompe à vide des TP3 n'est tenue que par 4 points, légèrement désaxés. Il faut les travailler d'environ 0.5mm pour pouvoir fixer l'ensemble. On peut récupérer facilement le système de lubrification pour la pompe à vide.

Nous déposons les périphériques moteur pour faciliter le passage : admission, pompes, filtres et supports, altenateur.

Le moteur tchèque est équipé en 12 volts. Nous avons fait le choix de rester en 24 V. Nous récupérons donc le démarreur 24v du bloc Man. On le pose tout de suite, après un nettoyage, car une fois le bloc posé, il est peu accessible.

Une partie du capot moteur de l'habitacle a été découpée : il faut pouvoir monter l'admission d'air de taille beaucoup plus conséquente. Cela facilite aussi le passage du nouveau bloc.

Avec la mini-pelle, Franck nous le repose sans difficulté. Les supports moteurs sont placés une fois le moteur en position dans son logement.

La boite de vitesse s'adapte avec le système d'embrayage Avia, en conservant la butée Saviem. (Montage disque de 280mm, axe 45mm en 10 cannelures.)

Montage de l'alternateur. Montage de la pompe à vide. Déjà signalé, 4 points de fixation. En rognant un peu, ça passe. Montage avec joints neufs, réalisation maison. Il faut adapter le retour de lubrification de la pompe, et récupérer le tendeur de courroie du 712 pour rester dans l'axe des poulies.

Remontage des tubulures d'injecteurs.

Le puits de jauge, en plastique, a cassé lors des manoeuvres. Il a du être remplacé.

La pompe à injection possède deux contacts électriques (électrovanne et démarrage à froid), il aurait été souhaitable de précabler avant. Maintenant, c'est moins accessible. On commence à préparer les cables d'alimentation.

 

Repose du refroidisseur d'huile, après nettoyage complet. Nous avons conservé le modèle Saviem, pourvu de sondes en 24V. L'espace est limité, pas facile de le mettre en place. Puis installation de la pompe à Gasoil. Nous avons récupéré celle de l'Avia, après nettoyage et remplacement de la membrane. Avantage, elle est pourvue d'un réchauffeur. Le modèle Saviem est un montage pompe / porte-filtre séparé, avec un bocal en pyrex.

 

Pour aider à l'amorçage, nous plaçons une poire à côté de la pompe à vide. Cela facilite les manipulations (dont la purge complète !).

Pour l'alimentation en gasoil, il faut revoir tout le montage, aller et retour. Le positionnement entre le Man et l'Avia sont différents. Pour le retour de graissage de la pompe à vide, nous avons confectionné une pièce spéciale. [Edit 2014] Elle n'a pas tenue, remplacée par un flexible.

L'échappement va poser quelques difficultés. La, il va falloir fabriquer une pièce sur mesure pour adapter la ligne sur le turbo.

*

Installation d'un système de cable pour l'accélérateur. On passe d'un système par tringlerie à un système par cable. L'installation effectuée est provisoire (cable dans une gaine de récupération).

Pose de la pipe d'admission.

Problème : impossible de poser le ventilateur. Il faut fabriquer une entretoise pour le poser sur la poulie. [Edit : finalement pose d'un ventilateur électrique, c'est plus simple]

 

Autre difficulté : impossible de monter les tubulures d'air. Il va falloir fabriquer du sur mesure. Nous réfléchissons à un système flexible.

 

 

 

Pour remplacer les durites d'origines qui ne passent plus sur le montage, nous utilisons des flexibles avec armature. Ils peuvent prendre de l'angle sans s'écraser.

 

Le circuit de suralimentation est monté avec du tube silicone. Un couge à 90° couplé à un flexible armé, qui vient s'emmancher dans le coude de la pipe d'admission.

 

 

Pour le circuit 12V, en particulier le préchauffage, nous installons un bloc fusible étanche 100A. Le circuit de préchauffage consomme environ 80A. On prévoit large, un gros relais 12V 200A.

Le Neiman est remplacé.

Après purge, le moteur démarre sans aucun problème. Le ralenti est stable, pas de bruit suspect.

 

 

Le premier test routier est décevant : l'embrayage patine, le camion se déplace difficilement, pas de puissance. Même en jouant sur le réglage, rien ne change. Il faut déposer pour chercher d'où vient le problème.

On vérifie les côtes sur les deux moteurs. La seule différence, bien visible sur la photo, le diamètre de la surface de friction. Le mécanisme est plus large sur le moteur Avia. Le diamètre de l'ouverture du diaphragme est identique.

 

 

 

Nous avions utilisé une butée neuve, mais provenant du montage Saviem/Man 712. Est-ce de là que vient le problème? On mesure. Il faut comparer avec le montage Avia.

Peut-être que le disque et trop usé ? Reste à remonter avec des pièces neuves pour essayer.

!Vaclav me fait parvenir un disque d'embrayage neuf : ça ne fonctionne toujours pas.

La butée reste appuyée... On s'interroge : volant moteur trop épais par rapport au montage d'origine ?

 

 

Suggestion de Sylvain (forum BMH) écarter la boite pour libérer la butée. On intercale donc un grand nombre de rondelles, jusqu'à un écartement de 1.2 cm. la situation s'améliore - la boite craque sur certains rapports - mais la butée n'est pas encore libérée totalement. Bonne idée, mais ça ne fonctionne pas :-(
Remplacement de la butée Saviem par une Butée Avia : la différence de taille est flagrante. Résultat sans appel : ça roule !

Il faut ensuite s'occuper du turbo qui fuit : Le modèle ressemble beaucoup à celui monté sur les Ford Transit 2.5TD. Un neuf pas cher en provenance d'Allemagne. Oups, l'orientation des deux turbines n'est pas la même. Heureusement, en les desserant, on peut les faire pivoter (merci Sylvain !).

Autre détail : la plaque en sortie du turbo diffère, là ou on doit placer l'échappement. L'idéal serait d'en trouver une de Ford Transit... Pour l'intant, nous avons bricolé avec ce que nous avons sous la main.

On a donc bricolé une sortie d'échappement, visuellement ce n'est pas très joli. Mais ça fonctionne.

Pose d'un vase d'extension (Vase du montage Avia). Il dispose de plusieurs entrées, une seule sortie. Je n'ai pas saisi l'utilité.

Pour faire suite à une discussion sur un forum : pour le radiateur, j'ai utlisé comme durite du tube flexible armé de 40mm. Il possède l'avantage de pouvoir être coudé sans s'écraser.

Non visible sur la photo, montage d'un ventilateur électrique 24V sur le radiateur, activé manuellement (bouton au tableau de bord).

Petite note de modernité : Les jauges Avia / Saviem étant incompatibles, j'ai monté un kit chinois digital. Pour cela, utilisation d'une vis taraudé M12 / 1/8e NPT Cela permet de monter ce type de kit universel. Affichage au degrès près, alarme surchauffe.

Au centre, vous noterez deux nouveaux témoins lumineux : un pour le préchauffage, l'autre pour le ventilateur de refroidissement moteur (activation manuelle).

 

 

Remerciements : Vaclav, Jean & Mag, Franck (Garage Express), Nicolas (le 2e) et Xavier. Côme pour la bribe d'échappement. Toute l'équipe du BMH pour les conseils réguliers.